Reconnaître le style Tsugaru

Aujourd'hui je vous présente l'un des 12 styles traditionnels. Je travaille depuis cette année seulement avec deux artisans du style Tsugaru, c'est donc l'occasion pour moi de parler un peu des spécificités de ces kokeshi !

Vous le savez sans doute, chaque type de kokeshi traditionnelle est étroitement lié à un lieu - une ville, ou toute une préfecture selon les cas. On en compte 12 au total : Tsuchiyu, Nakanosawa, Naruko, Togatta, Yajiro, Sakunami, Hijiori, Zao-Takayu, Kijiyama, Yamagata, Nanbu et Tsugaru, provenant tous de la grande région du Tohoku.

A gauche, deux poupées kokeshi de Yamaya Rei, dont une portant des pommes, une des cultures emblématiques d’Aomori. A droite, kokeshi ejiko avec une superbe pivoine aquarellée, par Kitayama Moriharu.

Le style Tsugaru est celui avec l'histoire la plus courte parmi les 12 styles traditionnels reconnus actuellement. Il a été créé pour représenter, ou promouvoir, l'identité de sa région de naissance : la province de Tsugaru, aujourd'hui intégrée à la préfecture d'Aomori. Aomori est la préfecture la plus septentrionale de l'île d'Honshu – après, c'est Hokkaido. Cette proximité géographique a eu une influence important, et les habitants d’Aomori partagent une histoire commune avec les aïnous, peuple indigène d’Hokkaido, forcés à “rentrer dans le rang” (se défaire de leur culture propre) au cours des siècles. Cet héritage est transcrit à travers des kokeshi Tsugaru.

Les caractéristiques de ces poupées kokeshi traditionnelles rassemblent des pivoines, des darumas (les stars des cerfs-volants qui font la fierté de la région).. et des éléments aïnous.


Les motifs aïnous consistent en arabesques et courbes, souvent doublées de pointillés tracées en rouge, à la pointe du pinceau. Ils sont utilisés en complément d'autres éléments, sur le buste notamment.

Motifs aïnous sur trois poupées kokeshi anciennes de type Tsugaru (deux kokeshi de Muramoto Fumio à gauche, une poupée de Hasegawa Kenzo à droite)

La réalisation des motifs, particulièrement les motifs de fleurs, est faite d'une manière plus illustrative que dans les autres styles, valorisant moins le trait du pinceau façon peinture à l'encre. Les pivoines ont volontiers un aspect aquarellé ; les visages des darumas sont peints avec beaucoup de détails.

Détail d’une poupée kokeshi Tsugaru de l’artisane Kitayama Hiromi, ornée d’un visage de daruma.


Les poupées kokeshi Tsugaru sont faites d'un seul tenant, comme celles du style Kijiyama, mais avec des formes de corps qui s'en distinguent. Le buste est parfois rond, avec la taille étroite ; ou bien les épaules sont tombantes, et le corps droit. Contrairement aux autres styles qui favorisent bien souvent des mèches de cheveux ornées de motifs, les artisans peignent une chevelure dense.


Dans de nombreux cas, une pastille rouge est peinte au sommet de la tête, comme sur la photo ci-dessous. C’est une bonne façon de différencier le style Tsugaru du style Kijiyama.


Le bois utilisé pour réaliser les poupées est souvent de l'érable japonais, un bois plus lourd que le cornouiller - utilisé massivement dans la préfecture de Miyagi. L'érable a également un grain plus prononcé.

Voilà donc quelques clés pour différencier le style Tsugaru des autres styles traditionnels de kokeshi… Alors, avez-vous des kokeshi de ce type dans vos collections ?